[Cannes 2025] Dans Variety, Bi Gan se confie à propos de RESSURECTION

Sept ans après Un Long Voyage vers la Nuit (2018), Bi Gan signe son grand retour avec Resurrection, présenté en compétition officielle au Festival de Cannes. Le cinéaste chinois, révélé par Kaili Blues en 2015 et reconnu pour son style onirique, propose cette fois un film en six chapitres qui explore un siècle de cinéma à travers un « monstre de cinéma » et la disparition des rêves. Je fais le pari que Resurrection décrochera la Palme d’or samedi prochain, tant le cinéma de Bi Gan épouse parfaitement les codes du cinéma de festival, entre exigence formelle et audace narrative.

Dans un entretien accordé à Variety, le cinéaste s’est confié à Naman Ramachandran sur les intentions artistiques derrière ce projet ambitieux.

Une structure en six fragments, entre rêve et cinéma
Décrit comme un « rêve fiévreux en six parties », Resurrection se déroule dans un monde où les rêves ont disparu. L’humanité ne sait plus rêver, à l’exception d’un « monstre de cinéma », dernier être encore habité par les illusions d’un monde onirique en voie d’extinction. L’apparition d’une femme capable de percevoir ces illusions relance l’espoir : elle décide d’explorer les rêves de cette créature pour en percer les mystères.

« Je voulais déconstruire le monde des esprits en six éléments », explique Bi Gan. Ces éléments sont les cinq sens – la vue, l’ouïe, l’odorat, le goût et le toucher – auxquels s’ajoute l’esprit. Ce schéma sensoriel sert de charpente aux six chapitres du film. « Resurrection libère un « monstre de cinéma » qui met en valeur un siècle d’histoire du cinéma », précise-t-il.

Un hommage au cinéma à travers le temps
Chaque segment du film explore une époque ou un style cinématographique. Le premier épisode, situé dans les années 1900, rend hommage au cinéma des origines. « Les écrans deviennent de plus en plus petits, et je veux vraiment faire redécouvrir au public cette ancienne sensation de regarder un film en salle », confie le réalisateur. Le film se nourrit notamment de l’expressionnisme allemand, et sa construction permet un voyage dans le temps cinématographique.

« Le sixième récit est le plus proche d’un film moderne », ajoute-t-il. « L’une des actrices est une comédienne très âgée qui tournait à l’époque. Sa présence dans la partie la plus contemporaine du film crée une boucle : elle nous ramène à l’origine, à cette célébration du cinéma. »

Un film personnel
Au-delà de sa richesse formelle, Resurrection est aussi une œuvre intime. « Ce film représente un moment de ma vie, mon énergie, et l’interaction avec les gens autour de moi. Même s’il célèbre cent ans de cinéma, il célèbre aussi la vie sur Terre, et l’énergie entre les gens, les communautés, et les espaces qu’ils habitent », confie Bi Gan.

Comme à son habitude, le cinéaste a choisi un titre chinois distinct du titre international : Kuang Ye Shi Dai (« ère sauvage » ou « âge barbare »), porteur d’un sens complémentaire. « Tous mes films ont des significations différentes dans leur version chinoise et anglaise. Mais en voyant le film, tout devient clair à la fin », souligne-t-il.

Un casting de luxe
Bi Gan évoque également son travail avec les comédiens. Face à une actrice expérimentée comme Shu Qi, il privilégie une direction intuitive : « Shu Qi a une très grande capacité à suivre le flux et un sens très développé de l’expression. Je pouvais lui dire : « Cette scène, c’est comme une danse », et elle comprenait tout de suite ». À l’inverse, pour Jackson Yee, plus jeune, il adopte une méthode plus structurée : « Je lui parlais de sentiments, de films, de manière plus spécifique. Je lui donnais mes idées, et il s’en emparait pour jouer. »

Une œuvre qui interpelle, même à distance
Bi Gan ne cache pas que son univers singulier peut déconcerter une partie du public international. « Parce que les spectateurs ne comprennent pas mon monde intérieur et ne vivent pas dans mon environnement, il y aura une différence, une distance dans leur compréhension du film », reconnaît-il. « Mais ce que je veux qu’ils ressentent, c’est la beauté du film et l’expérience d’être assis au cinéma. Tous ceux qui regardent mes films sont comme le monstre de cinéma — nous faisons tous partie du même écosystème que je montre à travers ce film. »

Une envie de recommencer plus simplement encore…
Malgré les sept années écoulées depuis Un long voyage vers la nuit, Bi Gan assure que d’autres projets sont déjà en gestation. « J’ai eu une idée du sujet pendant le montage de ce film, mais je ne vous le dirai pas — la graine existe, et je vais prendre du temps pour la développer », annonce-t-il. Et d’ajouter, non sans ironie : « À chaque nouveau film, je me donne pour mandat : « Le prochain sera plus simple. » Ressurection devait être un film simple en six parties, mais plus je tournais, plus cela devenait compliqué. »

Produit par Dangmai Films (Shanghai), Huace Film et la société française CG Cinema, Resurrection est distribué à l’international par Les Films du Losange.

Le casting comprend également la présence de l’actrice Li Gengxi qui a impressionné l’année dernière dans Viva La Vida, Mark Chao (Her Story), Huang Jue (The Unseen Sisterset Chen YongZhong acteur bien connu de la filmographie de Bi Gan.

À Propos de Tirry

Créateur et rédacteur en chef de Celestial Empire, connu également pour être le tenancier du site Jackie Chan France

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