Après avoir marqué les esprits dans le monumental Ne Zha 2, la troublante Lady Shi Ji s’apprête à vivre une nouvelle destinée. Le studio Damai (ex Alibaba Pictures) a en effet enregistré auprès de l’administration du cinéma en Chine, son prochain long-métrage d’animation, intitulé 《骷髅山里有秘密》 (soit littéralement : Le secret de la Montagne des Crânes), avec à l’écriture Zhang Chun (co-scénariste de la franchise Detective Chinatown) et Hao Shan (directrice de l’animation sur Ne Zha 2).
Le synopsis dévoile une relecture intime de ce personnage issu du roman mythologique de la Dynastie Ming (fin XVIe siècle, début XVIIe siècle) L’Investiture des Dieux. Considérée comme une « pièce défectueuse » née des fragments de la déesse Nüwa, Shi Ji est jalousée et bannie par ses pairs. Retirée sur la Montagne des Crânes, elle entreprend de forger un artefact maudit, le Miroir du Vide, pour défier les immortels. Mais l’irruption d’enfants humains vient briser son projet et bouleverser son destin : renonçant à sa rancune, elle choisit finalement de se transformer en montagne, accomplissant à sa manière une réparation du ciel.
À ce stade, il reste encore plusieurs zones d’ombre : rien ne permet de confirmer s’il s’agira bien du même personnage tel qu’introduit dans la saga d’animation Ne Zha de Jiaozi. Le nom du réalisateur n’a pas non plus été dévoilé. De plus, ce nouveau projet est porté par Damai, alors que la saga d’animation appartient à Enlight Pictures, ce qui accentue l’incertitude quant à la continuité des univers.

Une apparition remarquée dans Ne Zha 2
Dans Ne Zha 2, l’apparition de Shi Ji avait déjà surpris et conquis une partie du public. Son design, à la fois disgracieux et attachant, mêlait l’aspect imposant d’un démon obèse et massif à une bonhomie inattendue, presque attendrissante. Cette ambiguïté lui conférait une vraie popularité, renforcée par les récits parallèles publiés autour du film.
Dans l’album illustré officiel Ne Zha : Chroniques des Trois Mondes, on découvrait ainsi une Shi Ji plus vulnérable : désireuse d’approcher un chat errant, elle prit l’apparence d’une version miniature d’elle-même en pierre pour ne pas l’effrayer. Mais lorsqu’un ours menaça l’animal, elle dut révéler son véritable corps pour le sauver, faisant fuir à la fois l’agresseur et son compagnon félin. Derrière cette silhouette monstrueuse, le récit dévoilait une solitude poignante.
Les origines littéraires dans L’Investiture des Dieux
Les lecteurs familiers de L’Investiture des Dieux savent que Shi Ji y est décrite comme une pierre devenue esprit après des millénaires d’ascèse, maîtresse de la Montagne des Crânes, où elle recueille deux disciples, Biyun et Caiyun. C’est la mort accidentelle de l’un d’eux, causée par les jeux dangereux de Ne Zha, qui entraîne leur affrontement.
Le roman la montre dure et vindicative, avant qu’elle soit vaincue par Taiyi Zhenren, divinité taoïste, chef de la Secte Qingwei et maître de Ne Zha. Grâce à son arme magique, le Voile de Feu des Neuf Dragons, il parvient à enfermer Shi Ji puis à la réduire en cendres avec le feu sacré, son âme étant ensuite inscrite sur la liste des divinités.
Une réécriture moderne dans l’animation
Le film d’animation s’écarte de cette image impitoyable. Ne Zha 2 reconfigurait déjà son antagonisme avec le héros : ce n’était plus un conflit personnel, mais une mission imposée à Ne Zha dans le cadre d’une épreuve céleste. La différence majeure étant qu’ici, Shi Ji survit au combat, conservant la possibilité d’une rédemption.
Une figure attachante et ambivalente
La mise en chantier d’un spin-off centré sur elle confirme la fascination grandissante qu’exerce ce personnage ambigu. Pas simple ennemie, mais figure tragique, Lady Shi Ji incarne l’un de ces antagonistes complexes dont l’animation chinoise aime désormais explorer les zones d’ombre. Après avoir vu son amitié brisée avec un simple chaton, difficile de ne pas éprouver une empathie nouvelle pour celle qui, dans la mythologie, n’était qu’un obstacle sur le chemin de l’espiègle Ne Zha.
